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Génomique des plantes

Coffea canephora, le génome du caféier est séquencé


​Une étude internationale, coordonnée par des chercheurs du CEA (Genoscope), du Cirad, du CNRS, de l'IRD et de l'Université de Buffalo (USA), et impliquant de nombreux laboratoires a permis d'identifier, pour la première fois, une séquence génomique de référence pour les caféiers. Ces résultats ont été publiés dans la revue Science le 5 septembre 2014.

Publié le 14 septembre 2018
Coffea canephora, The coffee genome has been sequenced

Cette découverte revêt un double intérêt : tout d'abord fondamental, parce qu'elle améliore la compréhension de l'organisation du génome, de son fonctionnement et de son évolution ; finalisé ensuite, parce qu'elle offre de nouvelles perspectives de sélection ou d'amélioration des variétés de caféier.

Un petit grain qui vaut de l'or

Avec plus de 2,25 milliards de tasses consommées chaque jour dans le monde, le café est la première richesse de nombreux pays tropicaux. Selon les estimations de l'International coffee organization, plus de 8,7 millions de tonnes de café ont été produites en 2013, les recettes liées à l'exportation se sont élevées à 15,4 milliards de dollars US pour la saison 2009-2010 et le secteur employait près de 26 millions de personnes dans 52 pays en 2010.

Parmi les 126 espèces répertoriées dans le monde (Afrique, Asie), seules deux sont cultivées : Coffea arabica et Coffea canephora, robusta. Malgré son importance économique, le génome du café n'avait jamais été séquencé jusqu'à présent.

Séquençage de l'ADN du caféier

Dans cette étude publiée dans la revue Science, les chercheurs se sont intéressés au café robusta, du fait de son génome de taille moyenne (710 millions de paires de bases d'ADN) et de son caractère diploïde (1), contrairement à Coffea arabica, qui est tétraploïde (2). Le plan de caféier étudié, produit dans les années 80 par l'IRD en Côte d'Ivoire, présente également l'avantage d'être un matériel végétal homozygote (deux jeux identiques de 11 chromosomes), plus facile à analyser que les hétérozygotes naturels.

En utilisant plusieurs technologies de séquençage, le Genoscope (CEA) a coordonné l'obtention de la séquence d'ADN du caféier, assemblée en grands fragments susceptibles d'être utilisés dans différents types d'analyse. Les équipes de l'IRD et du Cirad ont ensuite ancré ces fragments de séquence sur une carte génétique haute densité, afin de reconstruire des pseudo-chromosomes. Un catalogue des gènes et des séquences répétées a enfin été réalisé et validé, permettant une comparaison avec d'autres plantes.

​Une étape capitale dans le décryptage du génome du caféier

Les chercheurs ont ainsi établi une séquence génomique de référence pour les caféiers (y compris pour l'espèce Coffea arabica), et plus généralement pour les Rubiacées, une des plus vastes familles des plantes à fleurs (regroupant près de 12 500 espèces).

L'analyse comparée des génomes par le consortium international a également révélé que l'organisation du génome du caféier est la plus conservée au sein des Astéridées (famille à laquelle appartiennent les pommes de terre et les tomates) et très proche de celle de l'espèce ancestrale dont toutes les plantes de type Dicotylédones (3) vraies (ou Eudicotylédones) ont dérivé au cours de leur évolution. Enfin, l'étude du génome améliore la connaissance du métabolisme secondaire (4) des plantes et de sa diversification. Une analyse comparative avec le génome du cacaoyer montre notamment que la biosynthèse de caféine est due à des enzymes propres à chaque espèce, apparues à divers moments au cours de l'évolution.

A plus long terme, l'identification de la séquence du génome du caféier ouvre de nouvelles perspectives en matière d'amélioration variétale, de connaissance des fonctions précises des gènes (notamment ceux spécifiques aux caféiers), de possibilité de transferts des résultats sur d'autres espèces et de mise au point d'outils de diagnostic du fonctionnement de la plante.

Elle va faciliter la réalisation de projets appliqués, comme la sélection ou la création de variétés de caféier présentant des caractéristiques technologiques et/ou qualitatives améliorées, plus résistantes aux contraintes environnementales et aux bioagresseurs, comme par exemple la maladie de la rouille orangée des feuilles. En effet, cette maladie a encore un impact considérable sur la caféiculture et l'économie des petits pays producteurs d'Amérique centrale tels le Guatemala, le Honduras ou le Costa Rica. Enfin, elle devrait contribuer à orienter les producteurs vers une agriculture écologiquement intensive.

L'ensemble des résultats est disponible pour la communauté scientifique sur une base de données publique développée par l'IRD et le Cirad et accessible en ligne

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(1) Cellule qui possède deux lots de chacun des chromosomes dont le nombre est propre à l'espèce considérée. Les caféiers canephora sont diploïdes et ont 2x11 chromosomes. 
(2) Cellule qui possède quatre lots de chromosomes. Les caféiers arabica sont tétraploïdes et ont 4x11 chromosomes.
(3) Classe de végétaux comprenant les plantes à ovaire renfermant deux cotylédons (lobes) dans la plantule de leur graine.
(4) Les métabolites secondaires sont des molécules qui ne participent pas directement à la croissance des plantes, contrairement aux métabolites primaires, mais qui ont une action déterminante dans l'adaptation des plantes à leur environnement.

En savoir plus

Laboratoires publics français impliqués dans l'étude : ​

  •  Résistance des plantes aux bioagresseurs (RPB - Cirad/IRD/Université Montpellier 2).
  • Ge​noscope,  Institut de biologie François Jacob (CEA).
  • Génomique métabolique (CNRS/CEA/Université d'Evry).
  • Diversité adaptation et développement des plantes (DIADE - Cirad/IRD/Université Montpellier 2).
  • Amélioration génétique et adaptation des plantes méditerranéennes et tropicales (AGAP - Cirad/INRA/Montpellier Sup Agro).
  • Génomique-Info (INRA).

Etude réalisée grâce au soutien de : 

  •  l'Agence nationale de la recherche (ANR) : projet « Analyses de séquences d'extrémités de clones BAC comme étape préliminaire au séquençage du génome des caféiers » (ANR-08-GENM-022-001) et « Séquençage du génome du caféier Coffea canephora (ANR-09-GENM-014-002).
  • Nestlé R&D (Tours)
  • Bioversity International (Montpellier)

​Séquençage :

Référence :

Denoeud F, Carretero-Paulet L, Dereeper A, Droc G, Guyot R, Pietrella M, Zheng CF, Alberti A, Anthony F, Aprea G, Aury JM, Bento P, Bernard M, Bocs S, Campa C, Cenci A, Combes MC, Crouzillat D, Da Silva C, Daddiego L, De Bellis F, Dussert S, Garsmeur O, Gayraud T, Guignon V, Jahn K, Jamilloux V, Joet T, Labadie K, Lan TY, Leclercq J, Lepelley M, Leroy T, Li LT, Librado P, Lopez L, Munoz A, Noel B, Pallavicini A, Perrotta G, Poncet V, Pot D, Priyono, Rigoreau M, Rouard M, Rozas J, Tranchant-Dubreuil C, VanBuren R, Zhang Q, Andrade AC, Argout X, Bertrand B, de Kochko A, Graziosi G, Henry RJ, Jayarama, Ming R, Nagai C, Rounsley S, Sankoff D, Giuliano G, Albert VA, Wincker P, Lashermes P, The coffee genome provides insight into the convergent evolution of caffeine biosynthesis. Science, 2014, 345(6201):1181-1184.